dimanche 4 octobre 2009

L'affaire Farewell


Note : 4/4

L’Affaire Farewell n’est pas une prouesse cinématographique, un film coup de poing porté par des effets de mise en scène délirants et des performances d’interprétation hors du commun.
L’intérêt du film de Christian Carion se situe ailleurs. Il réside dans le fait qu’il nous raconte une très bonne histoire. Une histoire vraie qui a clairement bouleversé le monde. Et elle est excellemment bien racontée.
Le propre du Cinéma étant de mettre en valeur de bonnes histoires, l’Affaire Farewell est une réussite.
L’histoire de cet officier russe qui, sous le rideau de fer, livre à l’ouest par l’intermédiaire d’un ingénieur français des informations sidérantes qui finiront par déséquilibrer la bipolarisation du monde à l’orée des années 80, est peu connue du grand public.
Il est fait allusion à cet épisode dans le Verbatim de Jacques Attali et dans quelques livres d’histoires et certaines biographies de Ronald Reagan et de François Mitterrand mais aussi déterminant soit il, cet évènement fait à tort d’avantage partie de la petite histoire que de la grande histoire.

Le film de Christian Carion remet habilement en valeur cet épisode historique.
Il ne cherche pas à rajouter des effets qui aurait pu faire de son film un thriller mais explique les faits de manière linéaire et humaine en n’en négligeant aucun aspect.

Il est ainsi fait allusion à la perception de l’élection de François Mitterrand en 1981 par les Etats Unis, à la vie de tous les jours et au climat oppressant qui sévissait en URSS sous Brejnev, aux différentes méthodes de renseignements entre les USA, la France et l’URSS ainsi qu’aux difficultés personnelles qu’entraine une telle histoire pour ces acteurs.

La représentation de Gregoriev, l’officier qui livre les renseignements à l’ouest est très émouvante. Emir Kusturica redonne vie à un patriote Russe épris d’humanisme de culture et de poésie française qui agit de manière totalement désintéressé dans le seul but de donner la possibilité à son fils de vivre dans un monde meilleure.
Cette passion pour la France qui peut paraître étonnante dans le film, s’explique par le fait que sous le rideau de fer le français était la première langue étrangère étudiée à l’école puisque l’Anglais y était banni de l’enseignement classique et uniquement destiné aux scientifiques, diplomates.
Des générations entières de Russes ont donc étudié Saint Exupery et son petit prince, la poésie de Rimbaud, Mallarmé et Baudelaire.

Guillaume Canet livre une prestation honnête de ce Français dépassé par les évènements qui se rend compte petit à petit de l’importance de son action et de l’amitié et du respect grandissant qu’il éprouve pour Gregoriev.

La réalisation, si elle est très classique, ne souffre d’aucune faiblesse.
Il prend son temps pour raconter l’histoire et ne nous inflige pas d’une mise en scène épileptique très en vogue en ce moment, ce qui fait beaucoup de bien.
Christian Carion s’attache à montrer Moscou aux débuts des années 80 avec des focales qui ne sont pas sans rappeler beaucoup de film des années 70 et qui en donne une représentation très crédible sans pour autant qu’elle soit dénuée d’un certain sens esthétique et d’ambition.
De plus la musique est mieux qu’un faire valoir dans ce film.
La mise en scène et le film pourrait évoquer un croisement heureux entre le cinéma d’Henri Verneuil (Le serpent) et le cinéma de Regis Wargnier (Est Ouest).

L’affaire Farewell est au final un très bon film et un vrai témoignage historique et une très bonne histoire d’espionnage.
Et en tout cas, c’est typiquement le genre de film qui me plait.

C’est aussi un film qui montrera aux adolescents d’aujourd’hui que la Russie d’il y a trente ans était très éloignée de l’image qu’ils peuvent en avoir aujourd’hui :
Celle de gros multimilliardaires mafieux à la Abramovitch qui passent leur vie sur des yachts à Saint Tropez en compagnie de mannequins habillées chez Gucci et Dolce et Gabana et qui s’encanaillent en faisant des bataille de Cristal Roederer avec Puff Daddy au nikki beach.

C’est dire si les conséquences de l’affaire Farewell auront dépassé les attentes du Colonel Gregoriev !!!

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